Le psoriasis en gouttes

Qu’est-ce que le psoriasis en gouttes ?

Le psoriasis touche 1 à 3% de la population et 0,5 à 2% des enfants.
Le psoriasis en gouttes est une variante du psoriasis qui représente jusqu’à un quart des cas de psoriasis [1] . C’est la forme la plus fréquente chez l’enfant, l’adolescent et l’adulte jeune alors qu’il s’agit de la 2ème présentation la plus fréquente chez l’adulte derrière le psoriasis en plaques. Il touche autant les filles que les garçons. Il peut survenir chez un patient sans antécédent de psoriasis ou compliquer un psoriasis en plaques existant.

Le psoriasis en gouttes se manifeste par l’apparition brutale de plusieurs lésions de petite taille (< 1cm), très ressemblantes les unes des autres, en forme de « gouttes », érythémato-squameuses, c’est-à-dire rouges ou rosées recouvertes d’une peau blanche qui se détache. Elles prédominent sur le tronc et la racine des membres et épargnent le plus souvent le visage.

L’éruption est classiquement déclenchée par une infection à streptocoque, surtout à type d’angine mais aussi anogénitale (vulvite, anite ou balanite).

Le diagnostic est orienté par les antécédents familiaux, l’aspect des lésions, la recherche d’atteinte d’autres localisations du psoriasis (cuir chevelu, ongles…). Aucun examen complémentaire n’est à réaliser pour confirmer le diagnostic. Ce n’est pas une maladie contagieuse.

psoriasis en goutte

Peut-il évoluer vers une autre forme de psoriasis ?

En général, le psoriasis en gouttes a un meilleur pronostic que les autres variantes du psoriasis.
Le psoriasis en gouttes peut disparaître spontanément dans 50 % des cas en 3 ou 4 mois sans cicatrice résiduelle, peut réapparaître par intermittence ou dans 40 % des cas, peut persister et évoluer vers un psoriasis en plaques chronique. [2]
Le risque d’évolution vers d’autres sous-types de psoriasis est généralement faible (8 % de rhumatisme psoriasique et entre 2 et 3 % pour chacune des autres formes : psoriasis pustuleux généralisé, palmo-plantaire, unguéal, érythrodermique) [3]
On ne sait pas si la rémission précoce du psoriasis en gouttes ou un traitement efficace peuvent réduire le risque de progression vers un psoriasis en plaques chronique. [1]

Comment soigner le psoriasis en gouttes ?

psoriasis en goutte

Principes du traitement

Le choix du traitement est une décision partagée avec le patient en fonction de son âge, de la sévérité de sa maladie (localisation, étendue…), du retentissement sur sa qualité de vie, de la présence de maladies associées, de ses préférences, de l’évolution naturelle de la maladie et des bénéfices et risques attendus des traitements. L’objectif est de rendre la maladie acceptable pour le patient.

Bien que de nombreuses modalités de traitement aient été largement étudiées dans le traitement du psoriasis en plaques, celles-ci n’ont pas été formellement évaluées pour le traitement du psoriasis en gouttes. Par conséquent, les recommandations actuelles sont principalement basées sur les résultats ciblant le traitement du psoriasis en plaques.

Étant donné la possibilité d’une rémission spontanée en quelques mois, un traitement actif peut ne pas être nécessaire, sauf à des fins esthétiques ou pour la gestion des éventuelles démangeaisons.
Dans les formes peu graves et peu invalidantes, le traitement repose sur l’utilisation de traitements locaux seuls : les dermocorticoïdes, parfois associés à un analogue de la vitamine D, sont généralement efficaces.
Une dispersion des lésions sur tout le corps rend les traitements locaux inadaptés (contraignants et peu pratiques). Dans ce cas, la photothérapie UVB à bande étroite est souvent proposée en 1ère intention, seule ou associée aux traitements locaux. [1]
Les traitements par voie générale, immunosuppresseurs ou immunomodulateurs, sont réservés aux formes modérées à sévères ou qui se chronicisent.
Une antibiothérapie est indiquée en cas d’infection sous-jacente à Streptocoque.

Mesures générales

Les facteurs favorisants sont les mêmes que pour le psoriasis en plaques (frottements, certains médicaments, tabac, alcool excessif…) et sont à éliminer si possible. Comme pour le psoriasis en plaques, il est conseillé :

  • D’éviter de gratter car cela peut entraîner de nouvelles plaques de psoriasis (c’est ce que l’on appelle le phénomène de Koebner).
  • De limiter la consommation excessive d’alcool et le tabagisme qui sont des facteurs d’aggravation clairement établis.
  • Les conseils d’hygiène sont les mêmes que pour le psoriasis en plaques : les émollients et les kératolytiques (par exemple l’urée, l’acide lactique et l’acide salicylique) peuvent aider à adoucir la peau et sont des compléments utiles aux traitements. [4] Les émollients peuvent suffire à rendre cosmétiquement acceptable cette éruption qui va dans 50% des cas régresser spontanément. [5]

Options thérapeutiques du psoriasis en gouttes :

Dermocorticoïdes

Les corticoïdes par voie locale, très efficaces et faciles d’utilisation, constituent le traitement de première intention du psoriasis en gouttes peu étendu. Ils existent sous forme de lotions, sprays, crèmes, gels, mousses et shampooings.
Ils peuvent être utilisés seuls ou en association avec d’autres agents locaux tels que les analogues de la vitamine D et les kératolytiques.
Leur application prolongée sur des zones très étendues pose le problème de toxicité cutanée (atrophie cutanée, dépigmentation, vergetures…).

Dermocorticoïdes
Analogues de la vitamine D

Les analogues topiques de la vitamine D agissent sur la multiplication et la maturation des kératinocytes. Ils peuvent être utilisés seuls ou en association avec les dermocorticoïdes.

vitamine D
Photothérapie

La photothérapie corporelle totale aux ultraviolets (UV) est le traitement de première intention pour le psoriasis en gouttes modéré à sévère (c’est-à-dire un psoriasis en gouttes profus et réfractaire au traitement local). Elle permet de traiter une grande surface corporelle.
Il en existe 2 types : la photothérapie UVA et la photothérapie UVB. Elle s’effectue au cabinet du dermatologue.

  • La photothérapie UVA nécessite la prise de psoralène 2h avant la séance pour augmenter la sensibilité aux UV. Des lunettes noires protectrices sont à porter pendant et durant les 8h suivant la séance.
  • La photothérapie par UVB est la technique la plus utilisée actuellement car plus pratique à réaliser (pas de prise de médicament photo sensibilisant) avec le moins d’effet secondaire à long terme. Les UVB à bande étroite sont préférés pour le traitement du psoriasis en gouttes car plus efficaces. [1]

En général on réalise une trentaine de séances à raison de 3 séances par semaine ce qui rend le traitement contraignant. Les doses sont adaptées au type de peau. En France, ce traitement est généralement évité avant l’âge de 8 ans.
La photothérapie peut être utilisée seule ou en association avec des traitements locaux. Leur utilisation est limitée dans le temps du fait de l’augmentation du risque de cancer cutané à long terme (plus de 200 séances).
La photothérapie d’entretien pour prévenir la récidive du psoriasis en gouttes semble inefficace. [1]

Traitements par voie générale

Méthotrexate
A faibles doses, le méthotrexate a des propriétés anti inflammatoires. Il est administré par voie orale ou sous-cutanée une fois par semaine. Un supplément d’acide folique est donné pour réduire le risque de carence en acide folique. Il s’agit d’un traitement au long cours dont les doses peuvent être adaptées. Il nécessite une surveillance par prises de sang régulières des enzymes du foie, de la fonction rénale et des globules rouges et blancs.

Ciclosporine
La ciclosporine est un agent immunosuppresseur, il a une action rapide dans les 4 semaines. Ce traitement est pris deux fois par jour mais sa durée est limitée en raison du risque de toxicité rénale à long terme. Une surveillance de la pression artérielle et de la fonction rénale est nécessaire durant toute la durée du traitement.

Rétinoïde
Bien que les rétinoïdes aient été décrits comme une option thérapeutique efficace pour les sous-types de psoriasis tels que le psoriasis pustuleux et le psoriasis en plaques, il y a peu de preuves dans le psoriasis en gouttes. [1]

Apremilast
L’apremilast est un agent immunomodulateur. Il est pris par voie orale deux fois par jour. Il n’y a pas de suivi nécessaire par prise de sang. Sa prescription est autorisée à partir de l’âge de 18 ans.

Biothérapies
Elles sont envisagées après échec (efficacité insuffisante, contre-indication ou intolérance) d’un seul traitement systémique classique (méthotrexate, ciclosporine ou rétinoïde) et éventuellement à la photothérapie dans les formes modérées à sévères du psoriasis en plaques de l’adulte. Ils s’administrent par voie sous-cutanée. Il s’agit de nouveaux traitements onéreux qui nécessitent la réalisation d’un certain nombre d’examens et la mise à jour du calendrier vaccinal avant leur prescription.

  • Les anti-TNF : etanercept, adalimumab, infliximab, certolizumab
  • Les anti IL-12/IL-23 : ustekinumab
  • Les anti IL-17 : secukinumab, ixékizumab, bimekinumab, brodalumab
  • Les anti IL-23 : guselkumab, tildrakizumab, risankizumab

Spécificité du psoriasis en gouttes : intérêt d’une Antibiothérapie / amygdalectomie

Un traitement antibiotique est indiqué en cas d’infection à Streptocoque aiguë : angine (la plus fréquente) ou anogénitale (vulvite, anite ou balanite). Cependant, il n’est pas établi que le traitement de l’infection atténue directement les lésions de psoriasis en gouttes. [1]
Jusqu’à présent, l’intérêt d’une antibiothérapie systématique d’une infection streptococcique latente dans le psoriasis en gouttes est controversé.
Les amygdales étant un site majeur d’infection streptococcique, théoriquement, l’amygdalectomie peut limiter le réservoir du streptocoque et donc la survenue de poussées de psoriasis en gouttes, mais ce point reste débattu et est de moins en moins pratiqué.

Quelques définitions :

  • Topique : appliqué sur la peau ou une muqueuse
  • Chronique / chronicité : qui dure longtemps (par opposition à aigu)

L’essentiel

  • Le psoriasis en gouttes est une variante du psoriasis.
  • Il s’agit de la forme la plus fréquente chez l’enfant.
  • Il peut disparaître en quelques mois ou se chroniciser voire évoluer vers un psoriasis en plaques.
  • Une poussée de psoriasis en gouttes succède fréquemment à une infection à Streptocoque, une antibiothérapie est alors justifiée.
  • Les traitements sont les mêmes que pour le psoriasis en plaques : ils sont à adapter en fonction de l’âge du patient, de l’étendue du psoriasis, du retentissement sur la qualité de vie et de l’évolution.

Bibliographie

[1] Zhou T, Koussiouris J, Kim L, Vender R. Management of Guttate Psoriasis: A Systematic Review. J Cutan Med Surg 2024;28:577–84. https://doi.org/10.1177/12034754241266187.
[2] Ko H, Jwa S, Song M, Kim M, Kwon K. Clinical course of guttate psoriasis: Long‐term follow‐up study. The Journal of Dermatology 2010;37:894–9. https://doi.org/10.1111/j.1346-8138.2010.00871.x.
[3] Kridin K, De Luca DA, Mruwat N, Ludwig RJ, Thaçi D. The risk of different subtypes of psoriasis following an episode of guttate psoriasis. Journal of the American Academy of Dermatology 2025;92:315–6. https://doi.org/10.1016/j.jaad.2024.04.082.
[4] Leung AK, Barankin B, Lam JM, Leong KF. Childhood guttate psoriasis: an updated review. Drugs Context 2023;12:2023-8–2. https://doi.org/10.7573/dic.2023-8-2.
[5] Mahé E. Childhood psoriasis. Eur J Dermatol 2016;26:537–48. https://doi.org/10.1684/ejd.2016.2932.

Auteur : Dr Diane Pourchot, dermatologue

PH / service de dermatologie /CHIPS / site de Saint-germain-en-Laye

06/03/2025