Les préparations magistrales à l’aube des biothérapies… Quel avenir ?

Les préparations magistrales à l’aube des biothérapies… Quel avenir ?

Physiopathologie

Dans le cas d’une peau saine, les cellules de l’épiderme sont liées les unes aux autres, formant une barrière de protection qui permet de retenir l’eau, d’où une peau hydratée, sans sécheresse. Cette barrière cutanée de bonne qualité empêche le passage d’allergènes, le système immunitaire n’est donc pas suractivé et il n’y a pas d’inflammation. Dans la dermatite atopique, l’altération de la barrière cutanée engendre une déshydratation importante de la peau et la pénétration des allergènes extérieurs qui vont stimuler le système immunitaire. Ce système très réactif va réagir de façon excessive à ce qu’il considère comme une agression et entraîner les signes cliniques de l’eczéma : prurit, inflammation et suintement. Ainsi, bien qu’une révolution thérapeutique soit en marche pour traiter l’inflammation avec l’arrivée des biothérapies, restaurer la barrière cutanée reste primordial pour faire face à ce problème de stimulation antigénique et de sécheresse cutanée.

Intérêt des émollients dans la dermatite atopique

Les crèmes émollientes contribuent à restaurer la barrière cutanée, altérée chez les patients atteints de dermatite atopique [1]. L’émollient agit sur l’augmentation de l’hydratation des couches superficielles de l’épiderme via plusieurs effets : un effet occlusif (huiles minérales, vaseline…), un effet humectant (glycérine, urée…), un effet “émollient” à proprement parler (acides gras, céramides…). L’efficacité des émollients sur la xérose a été démontrée (preuve de niveau 2) [2].

Leur utilisation sur la peau sèche est capitale pour restaurer les lipides entre les cellules mais aussi maintenir l’eau dans la peau. Ils vont ainsi permettre de reconstruire efficacement la barrière cutanée et rendre la peau plus souple, moins sèche et moins perméable aux allergènes extérieurs. L’application régulière d’un émollient permet d’espacer les crises de dermatite atopique, d’améliorer la tolérance des dermocorticoïdes et de réduire leur utilisation.

Les préparations magistrales

La préparation magistrale est définie par le Code de la santé publique comme “tout médicament préparé extemporanément en pharmacie selon une prescription destinée à un malade déterminé”. En dermatologie, les préparations magistrales sont essentiellement des formes topiques constituées d’un excipient et d’un ou plusieurs principes actifs destinés à traiter une pathologie précise. En effet, le prescripteur a la liberté d’ajuster le traitement en fonction de son patient en jouant sur les concentrations d’actifs, sur leurs associations ainsi que sur le choix de l’excipient. Le cérat de Galien a été inventé au IIe siècle par le médecin grec Claude Galien qui donna également son nom à la galénique. Il s’agit d’une des plus anciennes compositions dermatologiques. Ses différents intérêts sont présentés dans le tableau I. Le coût du traitement des produits finis peut être un frein à se traiter pour certains patients et l’observance thérapeutique peut être fortement diminuée pour cette raison. Ainsi, le remboursement des préparations magistrales sous certaines conditions peut être un avantage. Les préparations magistrales émollientes sont remboursées dans les indications de la circulaire de la Sécurité sociale et selon les pratiques des caisses régionales, ce qui est donc un réel avantage pour l’observance des patients. Par exemple, une préparation à base de glycérolé d’amidon est remboursée à 65 % par la Sécurité sociale en cas d’atopie sévère si le prescripteur le souhaite (tableau II). Le glycérolé d’amidon est un principe actif avec des propriétés émollientes, apaisantes et antiprurigineuses ; il peut être utilisé chez le nourrisson, l’enfant et l’adulte.

Y a-t-il un intérêt à diluer les corticoïdes locaux dans la dermatite atopique ?

Les dermocorticoïdes sont le traitement de référence des formes peu étendues (jusqu’à 10 % de la surface corporelle). Ils ont une action anti-inflammatoire, immunosuppressive et anti-proliférative. La conférence de consensus de la Société Française de Dermatologie considère que les préparations visant à diluer les dermocorticoïdes n’ont pas de place. Cependant, la dilution des dermocorticoïdes est largement pratiquée par les dermatologues. L’intérêt pourrait être de diminuer le risque iatrogène et de rassurer les patients souvent corticophobes.

interet de prescrire une preparation magistrale
exemple de preparation magistrale

Bibliographie

  1. Man G, Elias PM, Man MQ. Therapeutic benefits of enhancing permeability barrier for atopic eczema. Dermatologica Sinica, 2015;33:84-89.
  2. Prise en charge de la dermatite atopique de l’enfant. Conférence de consensus. Ann Dermatol Venereol, 2005;132:1S9-18.

 Rédigé par les Drs Emilie Brénaut et Justine Daguzé, d’après la communication du Dr François Maccari (Hôpital Bégin, Saint-Mandé, Hôpital Saint-Louis, Paris ; Cabinet libéral La Varenne, Saint-Hilaire).

MAJ : 26 octobre 2018